Tite crise
Par Émile Brassard
Le talent de socialité paraplégique
L’incisive bonbonne de gêne
Et d’anxiété cryogénique
Les crocs de l’effroi
Font encore trembler ma mémoire
Je balbutie, esquive, tombe
Avant de me sauver
Des tables de calcul me bloquent
Le passage de l’air
De mes poumons à mes pouvoirs
La tuyauterie hautement allergique
Me fait vite savoir quant il manque d’espace
Mes hésitations gesticulent
Parfois
Et sans être claustrophobe
Je compte sur mes doigts toutes les sorties
Comme prisonnier du sortilège du ridicule
Ou de l’étouffement
Au moindre point de bascule, j’ai déjà planifié
Mon prochain coup de vent
Le tortueux labyrinthe dans ma tête navigue entre
Torture et joie immense
Caché, léger et heureux
Je ne cherche, mais je me poursuis
Le pouls qui culbute
L’air qui me crispe, m’échappe, s’envole en montgolfière
Mes grands respires simulent le parachute
En vrai, je ne ressens que la brûlure de la peur dans mon dos
Les yeux exorbités, hagards de ma tête déplumée
Cherchent un appui, un débarcadère, une fenêtre
Ou un quelconque bouton d’arrêt
Pour moi, c’est le même vacarme émotionnel que
Sous un train sur la track du chemin de fer
Mes moyens se matérialisent au même rythme
Qu’ils s’irrationalisent
Au fond de ma poche, ma main serre fort le petit bâton de bois
Comme pour me distraire de la noyade
Étranger à moi-même, je me surprends et j’hallucine
Les vapeurs de mes origines calcinées me montent droit à la tête
Mes racines sèches et intoxiquées ont flambé
Comme un feu de paille
Je vois le temps comme un grillage qui s’effrite et
À travers lequel je ne reconnais pas les gens qui passent
On est chacun dans son couloir, dans le même sous-sol éclairé
Aux interactions on ne se croise pas, on s’évite ou on se marche dessus.